ANALYSE DE LA PROPOSITION DE SIMPLIFICATION DES ESRS DU 31 JUILLET 2025
Le 31 juillet, l’EFRAG a proposé des normes ESRS simplifiées, réduisant considérablement le nombre de points de données tout en conservant les objectifs fondamentaux du Pacte vert pour l’UE.
Cette proposition est désormais ouverte à la consultation publique jusqu’au 29 septembre 2025. Les versions révisées des normes ESRS et l’enquête de consultation sont disponibles ici : https://www.efrag.org/en/amended-esrs-0
Une analyse approfondie de la proposition de simplification des ESRS donne une indication claire de l’avenir probable du reporting en matière de durabilité de l’UE, qui est appelé à perdurer.
Elle met également en lumière les enseignements tirés de la première vague de rapports de l’exercice 2024, qui n’a pas toujours répondu aux attentes, et nous donne les clés pour produire des rapports de durabilité pertinents, utiles et conformes pour l’exercice 2025 et au-delà.
Le document ci-joint (en anglais) a pour objectif de vous donner un aperçu des normes ESRS simplifiées proposées, y compris les retours de l’EFRAG sur la première vague de reporting, afin de préparer un reporting ESRS de haute qualité.
Nous espérons qu’il sera utile tant aux entreprises de la première vague préparant leur rapport pour l’exercice 2025 qu’aux entreprises de la deuxième vague mettant en place un système de gouvernance de la durabilité pour préparer leur rapport sur l’exercice 2027.
Voici quelques-uns des principaux points que nous retenons de la proposition de simplification des ESRS de l’EFRAG (vous trouverez plus de détails dans le document complet) :
Réduites de plus de 50 %, mais toujours conformes à la CSRD et conservant les objectifs fondamentaux du Pacte vert pour l’UE : comment est-ce possible ?
La longueur globale des normes a été raccourcie de plus de 55 % et le nombre de points de données obligatoires a été réduit de 57 %.
Pourtant, le contenu essentiel des informations attendues nécessaires pour satisfaire aux obligations de la CSRD et aux objectifs du Pacte vert pour l’UE reste quasiment intact. Comment est-ce possible ?
Une approche moins contraignante – une responsabilité accrue de la direction
Tout d’abord, l’EFRAG a proposé une approche moins contraignante avec une granularité réduite pour les informations narratives.
L’objectif de ce que l’utilisateur du rapport doit comprendre d’une information spécifique est clairement énoncé. Les exigences d’application (AR) et les directives de mise en œuvre non contraignantes (NMIG) précisent le contenu attendu, ou qui pourrait être attendu, de cette information.
Les normes laissent ensuite à la direction le soin d’inclure les informations pertinentes, tout en respectant les caractéristiques qualitatives requises (descriptions complètes, neutres, exactes, claires, concises, comparables, vérifiables…) et les critères de matérialité de l’information (utilité décisionnelle, compréhension des IRO matériels…).
Bien que cela offre plus de flexibilité, l’ajout de l’exigence de ‘présentation fidèle’ (fair presentation en anglais) indique clairement que la direction est responsable des informations qu’elle fournit au marché.
En effet, les normes reconnaissent implicitement que pour obtenir une présentation fidèle de l’information, il peut être nécessaire que la direction fournisse des informations allant au-delà de celles spécifiquement requises par les normes.
Simplifiées et ciblées, avec moins de chevauchements et de doublons
Deuxièmement, les normes ont été simplifiées, avec moins de chevauchements et de doublons.
Elles s’articulent désormais autour de la normalisation de la description du contenu principal pour tous les enjeux, et sous-enjeux le cas échéant :
→ IRO, politiques, cibles, actions et métriques (avec un contexte narratif pour les métriques ESRS et les indicateurs spécifiques à l’entité).
Un paragraphe a été ajouté pour clarifier explicitement que la présentation fidèle des IRO matériels est l’objectif du reporting ESRS sur la durabilité. (ESRS 1, par. 3)
Les normes précisent également que les informations sont matérielles et doivent être incluses lorsque (ESRS 1, par. 21) :
(a) l’omission, l’inexactitude ou l’obscurcissement de ces informations pourraient raisonnablement influencer les décisions que les principaux utilisateurs des rapports financiers à usage général prennent sur la base de ces rapports, y compris les états financiers et les états de durabilité ; ou
(b) il est nécessaire que les utilisateurs des rapports de durabilité à usage général comprennent les impacts, risques et opportunités matériels [IRO] de l’entreprise et la manière dont elle les identifie et les gère [au moyen de politiques, d’actions, de cibles et d’indicateurs].
Nous devons rendre compte d’un enjeu donné lorsque celui-ci concerne un ou plusieurs IRO matériels, identifiés par l’évaluation de la double matérialité. (ESRS 1, par. 22)
La description des IRO matériels doit préciser quelles politiques, actions et cibles se rapportent à quels IRO matériels. (ESRS 1, par. 113)
Ainsi, l’identification des IRO matériels – y compris leur localisation et comment ils apparaissent tout au long de la chaîne de valeur – grâce à une évaluation de la double matérialité conforme, et l’explication de leur gestion – en faisant clairement référence aux politiques, actions, cibles et indicateurs associés, comme base d’une gouvernance solide en matière de durabilité – restent au cœur des normes ESRS simplifiée.
Toutefois, reconnaissant que nous sommes encore en phase d’apprentissage et que nous développons de nouvelles capacités, des allègements ont été inclus pour permettre la publication des informations disponibles à la date de publication « sans coût ni effort excessifs », tout en exigeant de la transparence et la publication des mesures prises pour accroître la couverture et la qualité des rapports futurs, ainsi que les progrès réalisés par rapport à la période de publication précédente. (ESRS 1, par. 87 et 91)
Enseignements tirés de la première vague de reporting de l’exercice 2024 : quelles erreurs ont été constatées ?
La lecture des fichiers ‘Log_of_Amendments’ de l’EFRAG fournit de précieuses informations sur les éléments non publiés comme prévu par les entreprises de la première vague de l’exercice 2024.
Publications génériques (‘boilerplate’) non pertinentes
Un point important dans les fichiers log est la mention répétée d’éviter les publications génériques, ‘boilerplate’ en anglais, contenant des informations standards, non pertinentes pour la compréhension des IRO, des processus et des circonstances propres à chaque entreprise.
Des commentaires sur les publications génériques et non pertinentes sont présents tout au long des fichiers log, pour ne citer que quelques exemples :
- …comme des informations décrivant en détail que l’entreprise a appliqué les critères décrits dans la norme ESRS 1 et/ou suivi le processus DMA recommandé (ESRS 1, 26).
- Ajout – pour clarifier qu’une entreprise doit communiquer des informations pertinentes et éviter les informations génériques (ESRS 2, AR28).
- Suppression – Informations génériques et redondantes (entretiens et enquête publique) (DP 48f/g et 45c dans ESRS 2 Set 1).
- Ajout – pour favoriser une information plus connectée et pertinente (ESRS 2, AR24).
Et cela est désormais précisé dans une nouvelle exigence d’application (ESRS 2, AR28) :
« Les informations doivent, dans la mesure du possible, être spécifiques à la période de reporting et éviter les descriptions génériques, sauf si nécessaire pour permettre de comprendre l’approche actuelle de l’entreprise en matière de gestion de ses [IRO] matériels. »
Lorsqu’elle rend compte de ses politiques, actions et cibles, l’entreprise doit communiquer des informations pertinentes, en évitant les informations génériques et donc non pertinentes pour les utilisateurs, par exemple lorsque des politiques et actions ont été mises en œuvre pour se conformer à la loi et à la réglementation, ou lorsque les informations nécessaires sont déjà fournies dans… SBM-1. »
Manque de liens et de contexte
L’absence de liens entre les IRO, les politiques, les actions, les cibles et les indicateurs, et le manque d’informations sur les liens entre les IRO matériels et la stratégie, le modèle économique, la chaîne de valeur et la résilience, figurent sans doute parmi les malentendus les plus importants relevés lors de la première vague de reporting de l’exercice 2024 (avec le sujet net vs brut que nous couvrons dans le document complet).
Les exigences de publication et les points de données ont été clarifiés afin de corriger ce problème (par exemple, ESRS 1, par. 113, ESRS 2 IRO-2 et SBM-3) :
« L’entreprise doit préciser quelles politiques, actions et cibles se rapportent à quels [IRO] matériels » (ESRS 1, par. 113).
Malentendus sur le concept d’impact positif
La signification d’impact positif a également été fréquemment mal comprise ; des clarifications ont donc été apportées pour corriger ce problème (ESRS 1, par. 36) :
Les impacts positifs de l’entreprise doivent être évalués individuellement et ne doivent pas être déduits et compensés par rapport à ses impacts négatifs.
Les résultats des mesures d’atténuation ou de remédiation prises par l’entreprise concernant les impacts négatifs causés ou contribués par sa conformité aux lois et réglementations ne constituent pas des impacts positifs.
Cependant, si ses activités, produits et services atténuent ou remédient aux impacts négatifs d’un tiers, cela est considéré comme un impact positif de l’entreprise.
La référence à la « philanthropie » a été envisagée par l’EFRAG, mais écartée. Seuls les impacts découlant des activités, produits et services sont considérés comme des impacts positifs à publier (fichier log ESRS 1).
Tri sélectif (‘cherry-picking’) et surreprésentation des informations positives
L’EFRAG met également en garde contre la nouvelle possibilité d’ajouter un résumé exécutif au début du rapport de durabilité (fichier journal ESRS 1, par. 109) :
L’introduction d’un « résumé exécutif » permettrait de fournir des messages clés compatibles avec les communications aux investisseurs.
Lors de la mise en œuvre de cette option, il est important de respecter les caractéristiques qualitatives de l’information, notamment en évitant de présenter principalement des informations positives dans le résumé exécutif et de laisser les informations négatives dans les parties détaillées.
Ces mots font écho à ceux publiés par l’ESMA (l’Autorité européenne des marchés financiers) le 1er juillet dernier concernant les risques d’écoblanchiment en faveur des investissements durables, rappelant aux acteurs du marché leur responsabilité de ne formuler des déclarations que dans la mesure où elles sont claires, justes et non trompeuses :
- Les rapports de durabilité doivent représenter fidèlement et précisément le profil de durabilité de l’entité, sans exagération et en évitant les faussetés.
- Les rapports doivent être précis et reposer sur tous les aspects positifs et négatifs pertinents.
- Les omissions et le tri sélectif (‘cherry-picking’ en anglais) doivent être évités.
- Les rapports doivent éviter toute imprécision et toute référence excessive à des informations non pertinentes ou non contraignantes.
La publication d’informations sur la performance en matière de durabilité est la nouvelle norme
Le dialogue avec les parties prenantes affectées, par le biais d’une diligence raisonnable continue en matière de durabilité (ESRS 1, par. AR11), ainsi que la mise en place de processus et de systèmes robustes de gestion des risques et de contrôle interne pour le reporting durabilité, sont essentiels à l’évaluation de la matérialité et contribuent à la cohérence des rapports financiers et de durabilité (ESRS 1, par. AR16).
Nous entrons dans une nouvelle ère, où seules les informations matérielles sont autorisées dans le rapport de durabilité (sauf cas spécifiques décrits dans l’ESRS 1, par. 107-8), et où l’omission, l’inexactitude ou la dissimulation d’informations matérielles comporte des risques juridiques et de réputation.
Les professionnels RSE, les services financiers, la conformité, le contrôle interne, les RH et la direction doivent collaborer pour pérenniser les pratiques de gouvernance et de reporting en matière de durabilité afin de répondre aux nouvelles attentes du marché, de préserver la confiance des parties prenantes et de garantir un accès continu à la finance durable.
Une analyse approfondie de la proposition de simplification des ESRS est utile si vous cherchez les clés pour produire des rapports de durabilité pertinents, utiles et conformes pour l’exercice 2025 et au-delà.
Nous espérons que cette lecture vous sera utile !
N’hésitez pas à nous contacter si vous souhaitez une présentation personnalisée et/ou un accompagnement pour mettre en place des processus et un système de gouvernance et de reporting efficace et complète en matière de durabilité.
#CSRD, #ESRS, #ESG, #Strategy, #Governance, #SustainabilityReporting, #Digitalisation, #CleeritESG
Clause de non-responsabilité
Le contenu de cette publication reflète la compréhension de CLEERIT à date et ne remplace pas les consignes de l’EFRAG. Ces informations ne remplacent pas les informations fournies par les autorités officielles, administratives et de gouvernance. Les informations contenues dans cette publication peuvent être modifiées, corrigées, complétées sans préavis. Bien que tous les efforts aient été déployés pour garantir que les informations contenues dans cette publication sont exactes et complètes, des inexactitudes peuvent exister. CLEERIT n’accepte aucune responsabilité pour tout type de perte ou de dommage pouvant survenir en relation avec l’utilisation des informations contenues dans cette publication.
© Cleerit le 25 août 2025